Afghanistan

Skateistan, le skate pour changer la vie

Skateistan, le skate pour changer la vie

Sur la vidéo, des jeunes filles slaloment sur une planche dans les rues de Kaboul, descendent les courbes raides, montent sur les trottoirs. Un film réalisé sans trucages : ça se passe vraiment en Afghanistan, dans un pays où les filles ne sont pas autorisées à faire du vélo, et cela a été rendu possible grâce à l’engagement de l’Australien Oliver Percovich, fan de glisse et pédagogue. Récit.

 

En 2007, Oliver Percovich s’installe en Afghanistan pour suivre sa petite amie, chercheuse. Ses déplacements en skate dans les rues de Kaboul déclenchent la curiosité. Alors, dans son quartier, avec les trois planches emportées dans ses bagages, Oliver apprend les rudiments de la glisse à quelques enfants et ados, utilisant comme bowl une ancienne fontaine publique. Face à l’engouement, et convaincu de la nécessité de faire de l’éducation une priorité, dans un pays où 70% de la population a moins de 25 ans, il crée bientôt Skateistan, un programme d’éducation par le skateboard, auquel il se consacre entièrement.

jeune femme qui fait du skate

©Skateistan

En 2008, une quarantaine d’enfants se partagent 4 skateboards dans un vaste entrepôt qui date de l’occupation soviétique. Aujourd’hui, 255 jeunes de 5 à 17 ans glissent sur les rampes d’un skatepark indoor de 1700 m2 (le plus vaste équipement sportif de la ville),  filles et garçons – quand les filles ne sont pas autorisées à faire du vélo, une pratique jugée « inappropriée », en Afghanistan : « le skateboard était trop nouveau pour être associé à un genre », se réjouit Oliver Percovich. Skateistan est ainsi l’un des très rares lieux récréatifs pour les filles et les jeunes femmes à Kaboul, qui représentent 50 % des élèves de Skateistan.

enfants qui font du skate

©Skateistan

Un deuxième skatepark a été ouvert en Afghanistan, à Mazar-e-Sharif, dans le nord du pays. Les cours rassemblent des enfants des quartiers pauvres, survivant en lavant les pare-brise des voitures (entre 50% et 70% des élèves travaillent dans la rue) ou issus des classes moyennes et aisées. Le skatepark est ainsi un lieu de rencontre fédérateur, qui rassemble en une communauté de riders des jeunes de tous les milieux sociaux et de toutes les ethnies. Pour tous ces jeunes, le skate permet de développer confiance en soi et relations d’entraide. A tous les apprentis riders sont également dispensés des cours de théâtre, d’arts plastiques et de journalisme. Chaque jeune passe autant de temps en classe qu’au skatepark : 1 heure sur la planche, 1 heure sur les bancs de l’école ! Et pour ceux qui sont déscolarisés, des cours de mise à niveau en lecture, écriture et mathématiques sont mis en place, ainsi qu’un accompagnement pour les faire intégrer à l’école publique.

filles qui font du skate

©Skateistan

Et ce n’est pas tout : 10 ans après sa création, Skateistan s’exporte  du Cambodge à l’Afrique du Sud. « Nous ne souhaitons pas former des skateurs professionnels, mais des adultes responsables », explique Dan, instructeur à Johannesburg. Et après Kaboul, Phnom Penh, Joburg, Skateistan continue son irrésistible progression en soutenant des projets similaires au Kurdistan irakien et en Palestine. 

 

Repères

50% des enfants afghans n'ont pas accès à l'école.

2/3 des filles ne sont pas scolarisées.

18% des jeunes femmes savent lire et écrire, contre 50% des jeunes hommes.

1 enfant sur 10 travaille.

45% des afghans ont moins de 15 ans.

18 ans c’est l’âge moyen de la population.


2,6 millions d’Afghans vivent en exil.

 

Par

MARION OSMONT

 

Photographies

SKATEISTAN.ORG